Julie Jauffrineau
Le président Donald Trump et le président Emmanuel Macron à la Maison Blanche (AFP)
« C'est pas moi, c'est la dette », dira Macron, le 10 septembre, acculé devant la foule de manifestants. La réforme des retraites : la dette. Le nouveau plan d'austérité : la dette. La dégradation des services publics, la suppression programmée de jours fériés : la dette. La loi Duplomb, encore la dette. La répression des voix qui s'élèvent contre le génocide à Gaza, toujours la dette ?
Et si le problème n'était pas la dette, mais Macron lui-même ? Et si la France macroniste ne servait pas les intérêts français, mais des intérêts outre-Atlantique ?
À l'origine de tous les maux politiques et sociaux, la dette française ?
La dette française, bien que préoccupante, est une formidable arme entre les mains du gouvernement. Elle permet de réclamer à la population plus de sacrifices. Après tout, « ce ne sont pas les gouvernements mais les Français qui dépensent l'argent [public] », osait affirmer tout récemment François Bayrou sur LCI. Mais, peut-être qu'à travers « les Français », Bayrou se référait au Président et à toute sa cour, y compris lui-même : depuis 2017, Macron peut se vanter d'avoir dépassé les 1 000 milliards d'euros de dettes accumulées. Une prouesse !
On se rappelle pourtant les recours décomplexés au 49.3, qui permet l'adoption d'un projet de loi sans vote de l'Assemblée nationale, pour échapper au vote du budget. Des mesures comme la suppression de l'impôt sur la fortune (ISF), en 2018, ou la suppression de 1 600 agents fiscaux, depuis 2017, ont également concouru à la baisse des recettes de l'État.
Une autre mesure surprend : le rachat par la France de la dette US, dans une période de crise des finances publiques. Ceci a beaucoup contribué à accroître la dette. À l'arrivée du « Mozart de la finance » au pouvoir, en 2017, la France détenait 74,4 milliards de dollars de dette souveraine américaine. Sept ans plus tard, elle en détenait 284 milliards ! À contre-courant de l'ensemble des pays du globe qui se défont du dollar, petit à petit, à commencer par la Chine. De même, les pays du Sud global s'émancipent du dollar dans leurs échanges commerciaux. Et le risque d'insolvabilité des États-Unis se confirme avec l'abaissement de la note US à AA+, par les agences de notation américaines, Fitch et Moody's, quand l'agence chinoise DAGONG, dès 2018, donnait à l'Empire la note BBB+. Cet investissement démentiel est donc incompréhensible.
Enfin, n'oublions pas le financement, via l'OTAN, du parc militaro-industriel américain à hauteur de 5% du PIB français. La France aurait pu faire le choix, comme l'Espagne, de ne pas obéir afin de stabiliser son budget. Elle a préféré se soumettre à Washington.
En réalité, le leitmotiv de la dette, tout en piétinant les droits sociaux, permet de rediriger l'argent ailleurs. Mais où et à quelles fins ?
Quand le « Mozart de la finance » brade la France
De la vente d'Alstom en 2015, au Doliprane cédé au fonds états-unien CD&R en 2025, en passant par Technip, bradé aux États-Unis en 2016, une série de décisions vont à l'encontre de l'intérêt national français, au profit des États-Unis.
Justement, rappelons-nous la vente d'Alstom, par Emmanuel Macron, alors ministre de l'Economie, à General Electric (GE). Macron fut conseillé pour la vente par Hugh Bailey, devenu ensuite DG de General Electric ! De plus, des cabinets de conseil comme McKinsey, qui ont poussé à cette vente, sont devenus les plus gros donateurs de la campagne 2017 de... Macron. N'y a-t-il pas conflit d'intérêts ?
Quoi qu'il en soit, la cession de Alstom Power au géant états-unien a signé la perte de l'exclusivité française en matière de turbine nucléaire Arabelle. Elle a rendu la France dépendante de son « allié » américain. En effet, cette vente a conduit au transfert d'activité et de brevets. Aujourd'hui encore, malgré le rachat d'une branche d'activité par EDF pour plus d'un milliard d'euros (soit le double du prix de vente d'Alstom à GE), la construction des turbines Arabelle s'effectue sur le sol américain, et les États-Unis ont conservé les contrats de maintenance des turbines à charbon.
Ces tractations sont révélatrices : Emmanuel Macron a dépouillé la France, au profit des États-Unis. Elles affaiblissent les finances publiques, elles fragilisent la souveraineté de l'État français par l'abandon d'un savoir-faire technique et scientifique unique. Heureusement, le terrain a été balisé puisque la Constitution française a été modifiée sous Sarkozy : désormais, en France, un président ne peut être poursuivi pour crime de haute trahison. Une aubaine pour les traitres.
En outre, ce suicide est à la fois national et international. La France se rend complice des guerres de conquête menées par le bloc de l'OTAN, que ce soit dans la guerre Ukraine-Russie, dans le génocide en cours à Gaza, ou dans les déstabilisations politiques du Venezuela et de la Somalie. En permettant aux États-Unis de s'endetter sur le dos de la France, en finançant l'armement états-unien (dont les stocks s'amenuisent à force de fomenter des conflits sur l'ensemble du globe), la France collabore à l'entreprise macabre de l'Empire en perte d'hégémonie.
Alors que souffle un vent de révolte populaire, alors que les Français se préparent à tout bloquer ce 10 septembre, le peuple français doit s'unir dans la lutte contre la désagrégation du pays, mais aussi pour l'autodétermination des peuples, pour la fin de l'impérialisme colonial et pour la paix. Il est temps d'en finir avec cette flambée de réformes, plus risibles et honteuses les unes que les autres, qui polarisent les débats et divisent les luttes sociales.
Le peuple n'est pas dupe : le pays est entré de manière antidémocratique en économie de guerre. Et cette économie de guerre permet à la « démocrature » macroniste de garder les mains libres pour engager la France dans une croisade impérialiste, ruineuse et meurtrière, que le tribunal de l'Histoire condamnera.