01/05/2025 francesoir.fr  5min #276562

Sanofi officialise la vente de sa filiale Opella et son Doliprane à un fonds américain

France-Soir

Sanofi à Amilly le 13 mars

Le Doliprane n'est plus français. Le groupe pharmaceutique français Sanofi a annoncé mercredi 30 avril 2025 la vente de sa filiale Opella, qui commercialise des traitements sans ordonnance, au fonds américain CD&R. Le géant pharmaceutique met fin au feuilleton de l'automne dernier, et empoche un chèque de 10 milliards d'euros pour céder le Doliprane, le médicament le plus vendu en France avec près d'un milliard d'euros de chiffre d'affaires annuel, ce médicament en vente libre controversé, aux effets secondaire désastreux pour le foie et dont la consommation, surtout excessive, inquiète les autorités sanitaires.

En octobre 2024, Sanofi a annoncé entrer en négociations exclusives pour céder 50 % de sa filiale Opella, qui détient Doliprane, au fonds d'investissement américain CD&R. Cette opération, expliquait le laboratoire français, s'inscrit dans une réorientation stratégique visant à produire plus de médicaments innovants et des vaccins, à travers des investissements dans la recherche et le développement.

L'État et Sanofi conservent 50 %.

La cession a rapidement suscité une vive polémique en France, où le Doliprane est un médicament emblématique et très consommé. Politiques, syndicats et citoyens ont exprimé leur inquiétude quant à la souveraineté sanitaire, à la sécurité de l'approvisionnement et au maintien des emplois industriels sur le territoire, dans un contexte de pénurie de médicaments.

Plusieurs députés ont demandé au gouvernement de bloquer la vente, estimant "que cette opération pose un enjeu très préoccupant pour notre sécurité nationale", allant à l'encontre des politiques de relocalisation et de lutte contre les pénuries de médicaments, portées notamment après la crise du Covid-19. Le gouvernement a exigé des garanties sur le maintien du siège d'Opella en France, la pérennité des sites de production et la sécurisation de l'approvisionnement en paracétamol, tout en enclenchant la procédure de contrôle des investissements étrangers.

Le projet de Sanofi a par la même occasion provoqué des mouvements sociaux sur les sites de production du Doliprane, notamment à Lisieux et Compiègne. Les syndicats CGT et CFDT ont lancé des grèves pour "défendre les acquis sociaux et la préservation des emplois", dénonçant un "manque de dialogue avec la direction" et une "communication insuffisante" sur les conséquences de la vente. Si la grève a été temporairement suspendue sur certains sites par les employés en apprenant que l'État avait affirmé avoir "obtenu des garanties extrêmement fortes", elle s'est poursuivie ailleurs.

Il est à rappeler la promiscuité de Sanofi avec le pouvoir, notamment Emmanuel Macron, et l'on pourra se souvenir que c'est Serge Wienberg à la tête de Sanofi jusqu'en 2023 qui l'aura aidé à rejoindre Rothschild, société dont il était administrateur. Ce même Wienberg qui a présidé la réunion du Club Dolder (club très influent et encore plus fermé que Bilderberg réunissant les dirigeants des plus grandes entreprises pharmaceutiques mondiales) à Paris  le 9 juillet 2018 à l'Élysée en présence d'Emmanuel Macron.

10 milliards pour qui ? 10 milliards pour quoi ?

La décision est actée depuis ce mercredi. Sanofi a annoncé avoir officialisé la vente de 50 % de sa filiale Opella. "Sanofi a reçu un montant net total en numéraire de l'ordre de 10 milliards d'euros" à l'issue de cette opération, selon un communiqué du géant pharmaceutique publié à l'issue de l'assemblée générale des actionnaires.

Le labo français conserve une participation de 48,2 % dans Opella. La banque publique d'investissement Bpifrance détiendra une participation de 1,8 %, souligne le communiqué. Un montant qui s'expliquerait par le besoin d'apporter des garanties, notamment la participation de l'État dans les décisions stratégiques du groupe, sans pour autant dissuader les investisseurs potentiels lors des négociations. Les 50 % restants sont ainsi cédés au fonds américain CD&R.

Le médicament le plus prescrit en France

"Ce nouveau chapitre marque le début d'une aventure prometteuse" pour Opella qui "est prête à croître et à prospérer", a déclaré le directeur général de Sanofi Paul Hudson. La filiale de Sanofi est active dans 100 pays et gère 13 sites de production avec 11 000 employés. Fin 2024, son portefeuille de produits a été réduit à 100 marques environ.

La cession de 50 % d'Opella à un fonds d'investissement américain marque la perte partielle d'un fleuron de l'industrie pharmaceutique française. Désormais, la moitié des recettes générées par ce médicament emblématique, leader du marché du paracétamol en France, ira à l'étranger.

Le Doliprane, produit à base de paracétamol, ou acétaminophène, est un composé chimique utilisé comme antalgique (anti-douleur) et antipyrétique (anti-fièvre). Il est le médicament le plus prescrit en France avec 300 millions de boîtes selon les chiffres de l'Assurance maladie à novembre 2024. Cet antalgique génère autant de chiffre d'affaires, qu'il n'inquiète dans le milieu médical, où certains médecins souhaiteraient le voir prescrire sur ordonnance, tant les effets secondaires sur le foie sont destructeurs, voire mortels dans certains cas de surdosage.

L'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) rappelle d'ailleurs régulièrement que le surdosage de paracétamol peut entraîner des lésions graves et irréversibles du foie, pouvant nécessiter une greffe, et que le paracétamol est la première cause de greffe hépatique d'origine médicamenteuse en France.

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