04/07/2025 legrandsoir.info  5min #283180

Pour un 14 Juillet internationaliste, contre le racisme et le néo-colonialisme

Christian EYSCHEN

D'une époque à l'autre et d'une société à l'autre, les cibles privilégiées changent. On stigmatise tantôt selon la religion ou l'irréligion, selon l'origine ethnique ou la couleur de peau, selon l'orientation sexuelle ou l'identité de genre... Le conflit de classe, nerf de la guerre, est bien plus rarement mise au premier plan car là, les arrière-pensées risqueraient de se voir. Dans la France des années 2020, le groupe désigné à la vindicte est un amalgame confus et révélateur entre les demandeurs d'asile, les réfugiés, les personnes étrangères sans papier contraintes d'émigrer depuis leur pays, les mineurs isolés, les Français issus d'immigrés venus des anciennes colonies et les musulmans. Selon le moment, le gouvernement et ses médias cibleront plutôt tel ou tel sous-groupe, tout en entretenant l'amalgame. Les motivations réelles de cet amalgame sont assez faciles à deviner lorsqu'on entend le très vendéen ministre de l'Intérieur déverser sa logorrhée obsessionnelle sur l'Algérie et entonner le même « bas les voiles » que le général Massu en mai 1958, tandis que De Gaulle s'installait à Paris. Il s'agit, encore et toujours, du ressentiment colonial qui hante les impérialistes vaincus.

Face à cette oppression, les Résistances s'organisent. Les personnes ciblées ont toujours le droit de s'organiser selon leurs propres moyens pour se défendre efficacement. Leur autonomie va de pair avec la solidarité des autres forces du mouvement démocratique. La Libre Pensée n'a jamais séparé les luttes, pas plus qu'elle ne se perd dans des inventaires qui les énuméreraient pour mieux ensuite appeler à les faire « converger ». Nous ne connaissons qu'un seul combat, le combat universel pour l'émancipation humaine. Nous sommes des êtres humains « libres et égaux en dignité et en droits », et cela suffit à caractériser notre engagement.

Il est difficile de déterminer ce qu'il y a de plus abject dans cette campagne xénophobe et autoritaire permanente, mais du point de vue de la Fédération Nationale de la Libre Pensée, la tartufferie la plus effrontée est sans doute le fait que cette accoutumance à la violence et à la xénophobie se drape du manteau de la laïcité. Mais plus rien n'étonne venant de gens qui ont présidé à la pire remise en cause de la loi de 1905 depuis Vichy, la loi « Séparatisme », en osant se prévaloir de cette même loi.

L'obscurantisme et le terrorisme islamistes fournissent la justification d'une militarisation des villes, à la surveillance policière des associations cultuelles et à une traque insoutenable contre les mineurs étrangers isolés. Ce n'est là qu'une alliance objective entre réactionnaires de différentes calottes, qui s'affronteront peut-être une fois qu'ils se seront taillés chacun son fief imprenable, mais qui pour l'instant sont surtout occupés à placer leur territoire présomptif sous l'éteignoir. Les mêmes qu'on entend éructer contre les Musulmans sous les hauts plafonds du 15e arrondissement parisien sont frappés d'extinction de voix quand il s'agit d'accueillir tel ou tel raïs ottoman ou syrien dont le maintien au pouvoir sert momentanément les intérêts de l'impérialisme. La sécularisation à marche forcée est justifiée par de grands arguments universalistes à domicile, mais cet universalisme ne pèse pas lourd devant les intérêts impériaux. La laïcité est une exigence de liberté individuelle et collective ; elle consacre l'objection de conscience qui résiste à la puissance de l'État ; elle fait un peuple libre qui se gouverne lui-même, là où d'autres voudraient un troupeau soumis à des maîtres et à des directeurs de conscience.

Dans sa Déclaration de principe, la Libre Pensée rappelle : « [La Libre Pensée] regarde les religions comme les pires obstacles à l'émancipation de la pensée ; elle les juge erronées dans leurs principes et néfastes dans leur action. Elle leur reproche de diviser les hommes et de les détourner de leurs buts terrestres en développant dans leur esprit la superstition et la peur de l'au-delà, de dégénérer en cléricalisme, fanatisme, impérialisme et mercantilisme, d'aider les puissances de réaction à maintenir les masses dans l'ignorance et la servitude. Dans leur prétendue adaptation aux idées de liberté, de progrès, de science, de justice sociale et de paix, la Libre Pensée dénonce une nouvelle tentative, aussi perfide qu'habile, pour rétablir leur domination sur les esprits. »

Aujourd'hui, en France, le sécularisme d'État, auquel certains esprits mal tournés entendent réduire la laïcité, devient une nouvelle religion officielle. Ce sécularisme « progressiste » à géométrie variable fonctionne comme la jambe gauche du nationalisme-catholique. Les laquais du pouvoir chantent les Lumières et le progrès avant d'aller communier à Notre-Dame, de citer des idéologues totalitaires du milieu du 20e siècle ou de déposer une gerbe à des ennemis de la République. Cette religion séculariste en vaut d'autres, elle a ses vérités révélées, ses prophètes, dévots, ses tartuffes et ses confesseurs princiers. Comme les autres religions établies, elle aspire à régenter nos vies pour le plus grand bonheur des possédants. Ces gens ne veulent pas de Dieu, mais ils veulent bien d'un maître. Cela nous suffit à les percer à jour.

Libres-Penseurs, nous combattons cette hypocrite irréligion d'État comme nous combattons toutes les religions : par l'engagement social et l'éducation populaire. Nous la combattons aussi pour la même raison que nous combattons les autres bigoteries : pour la liberté de conscience, pour la liberté d'organisation collective, pour l'égalité dans tous les domaines de la vie.

Le 14 juillet est la date qui symbolise cette aspiration démocratique à l'Égalité et à la Liberté. Depuis quelques années, cette date fait l'objet d'une réappropriation authentiquement républicaine par celles et ceux que les monarchiens et les bonapartistes d'aujourd'hui s'acharnent à exclure, à commencer par les exilés. La Libre Pensée soutient ces mobilisations du 14 juillet pour l'Égalité des droits, qui font honneur à la tradition révolutionnaire.

Liberté, Égalité, Fraternité !
Ni dieu, ni maître !
A bas la Calotte et vive la Sociale !

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